Jealous guy reminiscence

d’Antoine Stroh

En voiture, au volant, la nuit, les phares blancs en face et rouges devant, le moteur, doux ronronnement qui berce la monotonie du moment. Le volant à deux mains, le sourire et la cigarette aux lèvres. La main qui caresse la tendre poire du levier de vitesse. Et le corps, oui le corps, engourdi d’une douceur qui m’envahit par tous les pores. « Jealous guy » de Brian Ferry.

Une torpeur enivrante miraculeusement effleurée par une lichette rythmée, le frissonnement de la peau de la batterie, et la voix, oui la voix, doux Seigneur Jésus, BRIAN FERRY, comme une fraise gorgée de promesse posée à la limite du déséquilibre sur une pâte lisse et craquante à la vue, déjà. Il fredonne, les violons derrière, je suis à bout, j’en veux encore, des fraises vite des fraises. Y en a plus, des framboises alors bon sang, c’est la saison aussi. « I am just a jealous guy ».

Non mais qu’il arrête Brian, j’en peux plus d’avaler ces douces bontés de l’au-delà. Les myrtilles, les groseilles, vas-y Brian, achève-moi. Il cesse de chanter mais les divins synthés sont toujours là. Et ils font mal car la machine s’est emballée. Je ne touche même plus la pâte. Je prends les fruits à pleine main directement et les enfourne frénétiquement un à un dans la bouche. Je balance les tartes orphelines derrière moi. Ca y est. C’est fini. Je m’arrête, me love dans le fauteuil, le manteau me recouvre jusqu’au cou, la cigarette se consume dans le cendrier.
« I am just a jealous guy ».

Le rythme est ordre cadencé dans la survenance des choses F. Neveu

Bulletin de l’Atelier

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