Sale temps pour les tomates

Marie-Françoise Berherlet
mfrancoise.berherlet@gmail.com

 

Les vitrages cassés de l’une des serres laissent entrevoir une terre dans laquelle sont inscrits les restes de sillons de culture. Une végétation que je ne sais pas identifier s’est approprié certains espaces. Ailleurs, ce sont des flaques d’eau stagnantes, qui occupent une partie des allées de circulation, devant permettre au maraîcher de passer entre les rangées de légumes.

Il fait chaud cet après-midi, et l’orage menace, comme les jours précédents. S’il tombe de nouvelles trombes d’eau, voire de grêle, je ne sais pas ce qui restera de la serre déjà à demi détruite.

Le soleil est maintenant caché derrière les nuages gris violacé. La température est étouffante. Je marche vite pour rentrer à la maison, et éviter la pluie. Le grondement au loin se fait insistant. Mes pas se font de plus en plus précipités. J’entends  un craquement sec. J’ai posé le pied sur un morceau de vitre cassée.

Je longe maintenant une deuxième serre, moins abimée que la précédente et dans laquelle j’aperçois quelques rangs de tomates encore d’aplomb. Les portes sont grandes ouvertes pour permettre à la chaleur de circuler. Je devine de l’autre côté, masqué à cet endroit par des vitrages encore indemnes mais couverts de traces de poussières et de boue, la silhouette d’un homme immobile. Il doit être désespéré de l’arrivée de ce nouvel orage qui va détruire le peu qui reste de sa récolte.

Dire qu’en début de saison, les tomates forment l’essentiel de la culture sous serre, dans ce coin perdu, où d’ordinaire, si on n’irrigue pas, la terre caillouteuse n’accepte que quelques herbes sauvages, coriaces. Rien ne pousse ici autrement qui soit propre à la consommation.

Le toit de la maison est maintenant visible. Je vais pouvoir me mettre à l’abri. J’attendrai sur le pas de la porte que les premières gouttes ne s’abattent. Je ne pense pas que l’homme aux tomates soit aussi impatient que moi à l’idée de bientôt sentir monter l’odeur de la terre mouillée.

 

 

 

 

« J'aime l'allure poétique, à sauts et à gambades ; c'est un art (...) » Michel de Montaigne

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